Un président sénégalais polygame et deux femmes dans le palais présidentiel

04 avril, 2024 / Radouan Kourak

Depuis mardi, Bassirou Diomaye Faye a officiellement pris ses fonctions en tant que président du Sénégal, ce qui a suscité l’apparition publique de ses deux épouses, Marie Khone et Absa Faye. Cette situation a déclenché des débats au sein de la population sénégalaise et pourrait potentiellement perturber le protocole présidentiel.

Lors des dernières minutes de la campagne présidentielle au Sénégal, Bassirou Diomaye Faye a fait une entrée remarquée en tenant la main de ses deux épouses, Marie et Absa, sur une tribune. Cette scène, inédite dans le paysage politique sénégalais, a été saluée par des milliers de partisans enthousiastes. En choisissant d’afficher ouvertement sa polygamie, une pratique traditionnelle et religieuse profondément enracinée dans la culture sénégalaise, le candidat, porteur des idées de rupture et de panafricanisme, a été élu dès le premier tour du scrutin avec 54,28% des voix.

Jusqu’à présent méconnue du grand public, Marie Khone, sa première épouse avec qui il est marié depuis quinze ans et avec qui il a quatre enfants, est originaire du même village que lui. Il a épousé sa seconde épouse, Absa, il y a un peu plus d’un an. « C’est une consécration de la tradition de la polygamie au sommet de l’État, une situation qui reflète la réalité sénégalaise », estime le sociologue Djiby Diakhaté. Il ajoute que cette pratique est « plébiscitée » par de nombreux hommes, bien que de nombreuses femmes demeurent « méfiantes » à l’égard des principes qui la régissent. Sa consœur sénégalaise Fatou Sow Sarr, sociologue largement respectée, affirme que les modèles matrimoniaux tels que la polygamie, la monogamie et la polyandrie sont façonnés par l’histoire propre à chaque peuple. Elle souligne l’importance de reconnaître que « l’Occident n’a aucune légitimité pour juger nos cultures ».

La pratique de la polygamie est profondément enracinée dans la culture sénégalaise, en particulier dans les zones rurales. Conforme aux préceptes de l’islam, qui autorise un homme à avoir jusqu’à quatre épouses, la polygamie offre aux Sénégalais la possibilité d’élargir leur famille. Selon un rapport de 2013 de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie, environ 32,5 % des Sénégalais mariés vivent dans des unions polygames. Toutefois, ce chiffre doit être interprété avec prudence, car il est fréquent que certains mariages ne soient pas officiellement enregistrés auprès des autorités civiles.