Massimo Gargia : « Je voudrais qu’on retienne de moi que j’ai été quelqu’un d’amusant, qui a donné du bonheur aux autres…»

05 mars, 2024 / Jerome Goulon

S’il y a bien une personnalité qui incarne le milieu de la jet set, c’est Massimo Gargia. Infatigable, l’Italien, aujourd’hui âgé de 83 ans, est revenu sur les événements qui ont marqué sa vie et les incroyables rencontres qu’il a faites durant des décennies. Une interview poignante…

Jérôme Goulon : Bonjour Massimo. Quel est votre secret pour qu’une soirée soit réussie ?
On essaye d’organiser des surprises. Il y a plein d’événements en décembre, mais tout le monde veut venir chez moi. Les personnalités adorent mes soirées, parce qu’elles sont amusantes. En 46 ans d’expérience, je sais ce qui amuse les gens et ce qui les ennuie. Il y a deux points clés. Premièrement, j’essaye d’éliminer les discours, car ça ennuie beaucoup de monde. Deuxièmement, je mélange beaucoup les gens, et c’est ça qui amuse les participants. On fait aussi une vente de charité, mais j’essaye de la faire la plus brève possible, car ça ennuie beaucoup les participants.

C’est pourtant important…
Oui. Les temps sont tellement durs et tristes, il y a tellement de tragédies dans le monde qu’on ne peut pas faire une soirée seulement pour s’amuser.

Vous prenez toujours autant de plaisir à organiser des événements ?
La vérité, c’est qu’après toutes ces années, j’aimerais arrêter de faire des soirées, mais tout le monde autour de moi me demande de continuer ! J’en suis à un moment de ma vie où je préfère voyager. C’est ça qui me plaît le plus. Mais attention, j’adore toujours sortir. Je déteste rester à la maison tranquille pour regarder la télévision.J’ai encore un certain enthousiasme pour les gens.

Quelles est la personnalité qui vous a le plus marqué ?
La grande histoire de ma vie, c’est mon amitié avec Françoise Sagan. Elle était frivole, elle aimait boire, la drogue et les sorties. Elle aimait la vie. Ça nous arrivait de partir de Paris dans la nuit pour aller voir l’aube à Saint-Tropez …

Et vous aussi, vous aimiez la drogue ?
À une époque, j’ai pris beaucoup de drogue. Toute ma vie, j’ai été entouré de gens qui prenaient de la drogue, mais j’ai toujours eu la force d’arrêter après un ou deux jours d’excès. J’ai eu cette chance de ne jamais être accro ni à l’alcool ni à la drogue.

Vous avez rencontré beaucoup de personnalités importantes dans votre vie. On pense notamment à Dindina, la petite fille de Mussolini, avec qui vous avez eu une relation. Racontez-nous …
J’étais ami de sa mère, Edda Ciano. Le peuple napolitain l’adorait. Il n’y avait pas de haine contre la fille de Mussolini.
Et en effet, j’ai eu une histoire avec sa fille, Dindina, petite fille de Mussolini. C’est la première fois que je sortais avec une « célébrité ». J’étais jeune et beau. Elle, en revanche, était très laide. J’ai presque envie de dire qu’elle m’a violé.

Pardon ? La petite fille de Mussolini vous a violé ?
Disons qu’elle m’a presque forcé. Elle était très masculine, avec une personnalité très forte, comme son grand père. Mais je dois avouer que coucher avec la petite fille de l’homme le plus célèbre d’Italie, c’était assez excitant.

Vous étiez un grand séducteur ?
J’étais un séducteur sans le savoir. Je restais moi-même, donc je n’avais pas de technique de séduction. J’étais amusant et enthousiaste, avec une énergie extraordinaire. J’étais très beau, toujours très gai, et ces qualités plaisaient beaucoup aux gens dans le milieu de la jet set. …

Vous étiez attiré par /es gens célèbres ?
J’étais très curieux et attiré par la célébrité. C’est prétentieux de dire ça, mais j’ai eu très tôt pour ambition de conquérir le monde ! Je n’avais pas le talent d’un Picasso ou le génie d’un homme politique, alors j’ai utilisé ce que j’avais : mon physique et mon charme. Et j’ai connu les gens les plus importants du monde.

Vous êtes connu pour avoir fréquenté des femmes bien plus âgées que vous. Qu’est-ce qui vous attirait chez elles ?
Les femmes les plus importantes de l’époque étaient des femmes âgées, et il se trouve que je leur plaisais beaucoup. J’ai donc vécu des histoires avec des femmes plus âgées et beaucoup plus riches que moi, et de là, j’ai eu la réputation d’être un gigolo.

Et vous assumez cette étiquette ?
En fait, je ne me rendais pas tellement compte. Le désir d’avoir une Porsche était plus fort que moi, et je n’avais pas de grand principe moral. Mais après tout, pourquoi accepte-t-on que des hommes fassent des cadeaux à des femmes et pas l’inverse ? Donc dans le fond, j’étais assez moderne. Et puis j’ai eu des histoires avec des femmes célèbres sans rien demander en retour. Françoise Sagan n’était pas milliardaire. Greta Garbo, avec qui je suis resté trois mois, était d’une grande avarice, je payais tout pour elle. Au restaurant, alors qu’elle était la plus grande star du monde, elle regardait les prix. Elle me demandait si elle pouvait commander de la langouste, car c’était cher …

Quelle image retenez-vous d’elle ?
C’était une femme très seule. Elle ne supportait pas la célébrité, ça la rendait malade. Et moi, je lui parlais comme une femme normale, jamais de ses films. C’est ce qu’elle appréciait. Elle souffrait quand les gens la regardaient. Elle ne supportait pas de se voir vieillir, à tel point qu’elle avait retiré tous les miroirs chez elle à New York. Notre relation s’est finie du jour au lendemain. Elle m’a dit : «Tu m’as eu une fois, tu ne m’auras jamais plus.» Elle n’était pas seulement avare sur l’argent, elle ne voulait pas donner de la publicité à quelqu’un …

Vous avez eu également une relation avec Lydia Deterding, qui a été la maîtresse d’Hitler …
Oui. C’était excitant de se dire que l’homme le plus puissant du monde et moi, on avait touché la même femme. Mais en fait, elle n’avait pas vraiment couché avec Hitler. Lui, il faisait juste les préliminaires, il n’allait pas plus loin. Il était avec elle par intérêt, car son mari était le propriétaire de Shell.

Autre anecdote : vous avez connu Andy Wharol avant qu’il ne devienne célèbre. Il a proposé de vous faire un tableau, mais vous avez refusé …
Que j’ai été stupide ! Andy Wharol voulait absolument faire un portrait de moi habillé en femme. Mais moi, j’avais l’image du playboy de Naples, super macho. À l’époque, je n’avais jamais couché avec un homme. Je me suis fâché et j’ai dit non. C’est la bêtise de ma vie. À cette époque, un tableau de lui, ça valait entre 10 000 et 20 000 dollars. Aujourd’hui, ça vaudrait 20 millions de dollars. Mais j’étais tellement stupidement macho que ça me dégoûtait, et j’ai refusé. Il m’a tout de même donné trois lithographies de garçons travestis. Je les ai vendues 900 000 euros au début des années 2000. Avec cette somme, j’ai refait les jardins de ma maison en Normandie, avec ma femme.

Et au final, des années après, vous avez eu une expérience avec un garçon …
Oui. Je n’étais pas attiré par les garçons. Mais le frère d’un ami à moi m’a convaincu suite à un pari. Je lui ai dit que j’accepterais de coucher avec lui s’il m’emmenait dîner avec la reine d’Angleterre. Et puis un jour, on prend l’avion privé et on va dîner chez un couple anglais très antipathique. Et surprise, la reine est arrivée ! En fait, la maman de mon copain était la dame de compagnie de la mère d’Élisabeth. C’était ma mauvaise chance. J’ai dû tenir ma promesse …

Quel souvenir gardez-vous d’Élisabeth Il ?
Elle parlait très bien français, et essayait même de parler italien avec moi. Son mari, lui, était très antipathique. La reine s’était renseignée sur moi. Elle m’a parlé de Naples et de l’Italie. Je n’ai jamais rencontré une femme aussi gentille de ma vie.

Vous avez aussi fréquenté des hommes politiques, tels que John Kennedy …
Oui. J’ai rencontré John Kennedy un an avant son assassinat, à Newport, dans sa maison de campagne. Kennedy était d’une grande gentillesse. Sa femme, Jackie, était en revanche odieuse. Elle était intéressée par le pouvoir et l’argent.

Vous avez également côtoyé Donald Trump…
Oui, j’étais très proche de lvana Trump. Sa mort est une grande perte pour moi…

Et Donald Trump, comment est-il dans la vie ?
Pour résumer : Donald Trump est très amusant, très vulgaire et très dur avec les femmes …

Vous avez été longtemps connu dans le milieu de la jet set, mais pas du grand public, jusqu’à votre passage dans La Ferme Célébrités en 2004 sur TF1. Devenir une star était votre rêve ?
La Ferme Célébrités m’a donné une notoriété énorme. Mais au départ, je ne voulais pas participer à l’émission. J’ai refusé deux fois. Ma secrétaire avait dit non la première fois sans même m’en parler, car elle savait que je n’étais pas capable de mener une vie si dure à la ferme. La production m’a fait une deuxième proposition, que j’ai refusée, puis une troisième. Plus vous refusez, plus ils vous proposent une somme d’argent importante. J’ai fini par dire oui.

Et ils vous ont proposé combien ?
Beaucoup d’argent ! Une partie était pour moi, l’autre pour la fondation contre Parkinson. Mais c’était très dur pour moi. Au bout de deux semaines, j’ai inventé le fait que j’avais une pneumonie pour sortir. Quand je suis sorti, ils ont perdu 3 millions de téléspectateurs. Ils m’ont supplié de revenir.

Qu’est-ce que la célébrité a changé ?
Beaucoup de choses. Au début, c’était impressionnant. Une fois, j’étais au restaurant avec Alain Delon, et en sortant, des jeunes se sont arrêtés et ont hurlé mon nom. Alain Delon m’a dit : « Moi, j’ai fait plus de 100 films et toi, tu as fait l’idiot à la télé, et c’est ton nom que les jeunes crient et pas le mien ! »

Vous avez déclaré détester vieillir. Comme Greta Garbo, vous ne vous regardez plus dans le miroir ?
Je me regarde le moins possible dans le miroir le matin. Ou quand je me suis habillé et maquillé. Quand vous avez été très beau et que vous avez eu beaucoup de succès avec les femmes, c’est dur de vieillir… J’ai toujours du succès, mais ce n’est plus un succès physique. C’est triste …

Quelle est votre plus grande fierté ?
D’avoir toujours été moi-même et de n’avoir jamais fait de mal à personne, même aux gens qui m’ont fait des choses terribles ….

Qu’aimeriez-vous que les gens retiennent de vous plus tard ?
Je voudrais qu’on retienne de moi que j’ai été quelqu’un d’amusant, qui a donné du bonheur aux autres, et que j’ai toujours essayé d’être généreux…