EXCLU – Didier Raoult : « L’État voudrait jouer le rôle du médecin, mais chacun son rôle! »

21 mars, 2024 / Jerome Goulon

Le professeur Didier Raoult a sans doute été l’une des personnalités les plus clivantes durant la pandémie de Covid-19. Accusé d’être un génie par certains et traité de charlatan par d’autres, il agace autant qu’il fascine. Alors qu’il a publié un nouveau livre, « Ni angéliques, ni diaboliques : les antibiotiques », il s’est confié dans une interview  au cours de laquelle il n’a éludé aucune question.  Et ça envoie du lourd ! Retrouvez ici l’intégralité de cet entretien…

Entrevue : Bonjour Didier. Parlons de votre parcours. À quel âge est née votre vocation? 
Didier Raoult : Quand j’étais jeune, je voulais faire du bateau ! (Rires) Globalement, je ne voulais pas faire d’études. J’ai quitté le lycée à la moitié de ma première, parce que le lycée m’empoisonnait terriblement. J’avais eu la bonne idée de m’inscrire en candidat libre en première littéraire pour passer mon bac, et je l’ai eu. Et puis, pendant deux ans, j’ai fait du bateau et différents métiers…

Et ensuite?
Je me suis rendu compte que j’étais plus un intellectuel qu’un manuel. Je suis revenu pour faire des études et mon père m’a dit : « Écoute,  tu arrêtes les bêtises, maintenant, fais médecine ! » Je me suis donc inscrit en médecine. 

Ça correspond à la période où le numerus clausus a été mis en place, limitant le nombre de candidats admissibles au concours…
Oui. Quand j’ai commencé mes études de médecine, le concours venait d’être installé depuis deux ans. Ce concours est devenu rapidement l’un des exemples les plus spectaculaires de la folie des hommes politiques et des femmes politiques. La pire de toutes, ça a été Simone Veil, qui a instauré le numerus clausus en 1971. Il ne faut pas en dire du mal, car elle est au Panthéon, mais enfin, c’est elle qui a vraiment fait diminuer très brutalement le nombre d’étudiants en médecine et qui a créé un déficit structurel dont on ne sait pas combien de décennies il faudra pour le rattraper. C’est dramatique… 

Il n’y a pas assez de médecins en France? 
Non. Et il y a aussi le problème de la disparition de la médecine de proximité. Vous ne pouvez pas envoyer tout le monde aux urgences pour compenser ! Il faut considérer plusieurs choses : la population a vieilli et la demande de soins a augmenté. Et puis, ce qui n’était pas prévisible, ça a été la féminisation brutale de la profession.

Et en quoi est-ce un problème?
En moyenne, une femme en médecine travaille 30 % de moins qu’un homme. Ensuite, que ce soit les femmes ou les hommes, on leur interdit de travailler plus de 42 heures par semaine. Si vous prenez tout ça en compte, il fallait multiplier le nombre de médecins par quatre au lieu de le diviser par deux !

Vous parlez peu de votre vie privée. Vous arrivez à concilier travail et famille?
Oui, bien sûr, ma femme n’a pas cessé de m’aider. Je m’entends très bien avec mes enfants. J’ai une fille d’un premier mariage avec qui je ne m’entends pas… Mais à part ça, tout va bien ! Après, je n’ai pas de vie sociale. Je ne sors pas, je ne vais pas dans les cocktails, je n’ai pas de réseau. Quand j’ai fini de travailler, je rentre chez moi et je m’occupe de ma famille… Et je lis ! 

En 2020, le monde a été frappé par la pandémie du Covid. Vous aviez prédit qu’une pandémie arriverait…
Oui. On  m’avait demandé un rapport au ministère de la Santé et de la Recherche, en 2002-2003. J’ai écrit un rapport, il est toujours en ligne, il suffit de le lire. 

Et vous aviez une idée du moment où ça allait arriver? 
Non, mais il y a eu une coïncidence assez intéressante. Quand j’ai rendu ce rapport, ça devait être en avril 2003, le cabinet de Jean-François Mattéi était très hostile. J’avais écrit une chose extrêmement importante : « S’il y a une catastrophe, vous serez incapables de vous en rendre compte ! » J’ai écrit ce rapport l’année de la canicule, qui m’a donné raison sur un point : ils ne se sont rendu compte de rien du tout ! Il y a eu 70 000 morts cette année-là, et personne ne les a vus. Il a fallu que ce soient les croque-morts qui aillent dire : « On est en panne de cercueils ! ». Ça montrait déjà que le niveau d’impréparation en France est inouï. J’ai pensé, et je continue de penser, qu’on ne peut lutter contre les maladies infectieuses que si les gens qui voient les malades et les gens qui font le diagnostic sont les mêmes. 

Emmanuel Macron vous a appelé pendant la pandémie pour le conseiller. Est-ce que vous êtes toujours en contact avec lui? 
Je ne suis plus en contact avec lui. De toute manière, ce sont des des choses qui sont personnelles. Moi, je lui ai fait part de ce que je pensais, après il en a fait ce qu’il en a voulu. 

Comment jugez-vous votre rôle durant cette crise? 
Je ne sais pas quel rôle j’ai joué, mais pour résumer, je suis depuis 20 ans le microbiologiste ou l’infectiologue le plus cité au monde! Je faisais mon métier et je suis probablement l’un des hommes qui connaît le mieux l’hydroxychloroquine, parce que ça fait 30 ans que je l’utilise, que je n’ai jamais eu le moindre accident de ma vie en utilisant une posologie normale. 

Certains ont dit qu’elle provoquait des morts…
C’est parce que des fous en Angleterre ont prescrit des traitements quatre fois supérieurs à la dose normale. C’était des doses toxiques ! Notre ex-ministre de la Santé, François Braun le savait, parce qu’il a fait sa thèse de médecine là-dessus, en disant que le surdosage était toxique, mais il n’a rien dit. La plus grande cause d’empoisonnement au monde, vous savez ce que c’est ? C’est le Doliprane. 

Le surdosage de Doliprane, vous voulez dire? 
Oui, le surdosage ! Les gens prennent des Doliprane comme des bonbons, c’est vendu dans les pharmacies sans ordonnance. Donc si vous prenez 10 comprimés de Doliprane, vous faites une insuffisance hépatique qui peut-être mortelle. C’est la première cause de greffe hépatique aux États-Unis. Donc le Doliprane est infiniment plus dangereux que l’hydroxychloroquine. 

Tout le monde en parle, mais personne ne sait vraiment ce que c’est. Pouvez-vous, en quelques mots, nous dire ce que l’hydroxychloroquine? 
C’est un extrait de plante très ancien qui était utilisé au Pérou pour traiter les fièvres. En France, ça a été introduit sous Louis XIV pour traiter la fièvre du roi. C’était de la quinine à l’époque. C’est ensuite devenu un produit transformé et mieux toléré : la chloroquine. L’année où la chloroquine a été le plus prescrite, je crois que c’est 2006, avec 6 milliards d’ordonnances ! Ensuite l’hydroxychloroquine a été fabriquée parce qu’elle est mieux tolérée que la chloroquine, et en 2019, elle était vendue sans ordonnance en France. Plus de 66 millions de comprimés ont été distribués dans l’année. Comment une bande de zozos réussit-elle à faire croire que l’hydroxychloroquine est toxique ? C’est inouï…  C’est la preuve que l’on peut faire avaler n’importe quoi à n’importe qui. C’est un truc de fou. 

Donc vous contestez l’étude qui parle de 17 000 morts en lien avec le traitement par l’hydroxychloroquine? 
C’est pas une étude. C’est quatre zozos inconnus qui prennent des chiffres à droite et à gauche… Il était sorti trois études avant : une belge, une espagnole et une italienne, qui ont des résultats qui sont exactement les mêmes que les nôtres. Mais celles-là, personne n’en a parlé. Mais vous ne voulez pas vous réveiller ? C’est pas possible ! Un médicalement qu’on a distribué des millards de fois ne peut pas devenir toxique du jour au lendemain ! Mais qu’est-ce que c’est que cette bêtise-là… 

Des bêtises sont dites au plus haut niveau de l’État?
Oui. Regardez Olivier Véran , pour répéter des bêtises, il était assez fort. Il y avait un type qui avait pris un produit pour nettoyer son aquarium. Il l’avait avalé parce qu’il y avait marqué sur la boite «quinine» ou « chloroquine ». Il a avalé le produit entier et il est mort. Et là, Véran a dit à la télévision : « Regardez comme c’est dangereux, la chloroquine ! » 

C’est un coup à décrédibiliser un gouvernement?
Ce qui est sûr, c’est que la France s’est ridiculisée quand elle a dit qu’en Afrique, la chloroquine tuait. Les Africains ont bien rigolé quand même, car les Africains en ont tous pris et depuis très longtemps. La France a perdu sa crédibilité de manière phénoménale. C’est un des problèmes, le microcosme dans lequel vous vivez a l’impression que le monde tourne à l’intérieur du périphérique parisien, mais ce n’est pas vrai. Il se passe des choses ailleurs. Ça ressemble beaucoup à Versailles si vous voulez, et ça va se terminer comme ça…

Si on vous proposait le poste de ministre de la Santé, quelle serait votre réponse? 
Oh non, sûrement pas. C’est impossible. Et de toute façon, c’est impossible qu’on me pose la question.

Dès le début de la crise, vous avez subi de lourdes campagnes de dénigrement. Qui a voulu réellement vous faire du tort? 
Je ne crois pas beaucoup à ça. Je n’imagine pas qu’il y ait un grand fou qui tire les ficelles. Je pense qu’il y a des intérêts communs. L’une des choses extraordinairement dangereuses, c’est quand DES MILLIARDAIRES deviennent les conseillers de la santé publique ou de l’OMS. Bill Gates a investi massivement dans Pfizer et dans d’autres choses. Ces puissances sont les plus grands financeurs de l’OMS… 

Nous avons été submergés de chiffres. Certaines se contredisent. Est-il possible de trafiquer des données? 
C’est très facile. L’une des manipulations majeures de l’industrie pharmaceutique, ça a été de faire des études randomisées en double aveugle, parce que les seuls qui analysent les données et qui les trafiquent, c’est l’industrie. Puisque les médecins ne savent pas ce qu’ils ont fait, ils envoient toutes leurs données dans un bureau, comme pour Pfizer, et ensuite, on se rend compte qu’ils ont caché les données. Le premier point, c’est la transparence totale des données. Ce qui est loin d’être le cas. Aux États-Unis, par exemple, quand une industrie pharmaceutique fait une étude médicale, elle a le droit au secret pendant 10 ans… 

Le vaccin, après réflexion, vous en dites quoi ? Êtes-vous vous-même vacciné? 
Je ne réponds jamais à ça. Ce que je peux dire, c’est qu’il y a des lois en France, aux États-Unis et en Europe, qui font qu’il est interdit de faire un vaccin dans les conditions dans lequel il a été fait, sauf si on arrive à démontrer qu’il n’y a aucune solution autre que celle-là et qu’il y a un risque monstrueux pour la population. Or, il n’y avait pas de risque monstrueux pour la population, on l’a bien vu. 

Pensez-vous que des intérêts économiques ont pris le pas sur l’intérêt médical?
Ce que je constate, c’est que Pfizer a gagné 81 milliards de dollars en 2021 et que les forces en présence sont des forces qui sont absolument hallucinantes. Pour faire un vaccin comme ça, il faut deux ans, surtout un vaccin qu’on n’a jamais fait, avec de l’ARN. Maintenant, on se rend compte qu’il y a une quantité d’ADN considérable dedans, mais on ne sait pas ce que ça fait… On se rend compte que la lecture des ARN messager n’est pas celle qu’on pensait, que ça fabriquait des protéines inconnues dont on ne sait pas très bien ce qu’elles vont donner non plus. On est partis à l’aventure. Vous pensez qu’il y a plus de risque à essayer un vaccin ARN que jamais personne n’a testé ni évalué ou à prendre un médicament qui est prescrit depuis 150 ans ? 

Quel est le pays qui a le mieux géré la crise du Covid selon vous? 
Ceux qui ont fait pas mal, ce sont les pays scandinaves, ils n’ont pas eu de problème particulier. La Suède n’a pas fait du tout de confinement, pas fait de distanciation, rien du tout, et ils n’ont pas eu de morts.

Et ceux qui ont le moins bien géré la pandémie? 
Les Américains et les Anglais. Ce qui est très frappant, c’est que là où il y a la plus forte mortalité et là où il y a la plus grande régression de l’espérance de vie, c’est là où il y a le plus d’industrie pharmaceutique. En plus, ce sont eux qui ont les plus grands véhicules scientifiques d’évaluation thérapeutique, donc les plus truquées. Ils se suicident aussi à coup de fausses informations et de produits pharmaceutiques inutiles. On essaye d’éliminer tous les vieux médicaments qui marchent. 

Vous avez déjà envisagé de changer de pays vu l’acharnement et le lynchage dont vous êtes victime en France? 
C’est faux ! Vous vous faites des illusions. Même à Paris, les gens sont très gentils avec moi, je n’ai pas de problème. Je n’ai perdu aucun procès. Les médias me lynchent ? Moi, le seul problème que j’ai, c’est qu’on veuille faire des selfies avec moi ! (Rires) Les médias ne sont pas le peuple ! 

Vous regardez beaucoup la télévision? 
Je ne regarde jamais la télévision, je n’écoute pas la radio et je ne lis pas les journaux ! Récemment, j’étais sur un plateau et j’ai dû me taper le discours de l’ancienne ministre de la Culture, ça a été quelque chose de difficile à digérer. Quand on passe d’André Malraux à ça, on se dit que dans ce pays, il y a un problème. Et puis une partie de l’information passe aussi par les réseaux sociaux maintenant. Je peux vous dire que je fais des vidéos à 3 millions de vues, ce n’est pas les audiences de BFMTV… Il y a une chose qui me frappe sur la reprise des informations dans la presse. Prenez l’exemple de l’Allemagne. C’est un drame ce qu’il se passe en Allemagne avec les agriculteurs. Les grèves générales qui bloquent tout. C’est nos voisins ! C’est un vrai sujet. Il ne faut pas en parler parce que les Français, il ne faudrait pas qu’ils refassent le coup des gilets jaunes. Est-ce qu’il faut en parler pas en parler est devenu une question majeure des médias ? C’est pas la question. La question c’est : est-ce qu’on informe est-ce qu’on n’informe pas  ?

Parlons de votre dernier livre, consacré aux antibiotiques. Vous dites qu’il y a une désinformation massive. Que pensez-vous de la phrase : « Les antibiotiques, c’est pas automatique »? 
Cette phrase ne veut rien dire ! On ne sait pas trop de quoi ils parlent. C’est une stratégie de cet État qui devient de plus en plus envahissant. Par exemple, en Suisse, vous pouvez acheter des antibiotiques sans ordonnance. En France, on ne peut pas les prendre sans ordonnance, donc si l’État devait s’adresser à quelqu’un, il devrait s’adresser aux médecins. Mais là, il passe par-dessus la tête des médecins pour dire aux malades ce qu’ils doivent faire. C’est la même chose que pendant le Covid, quand il disait : « N’allez pas voir votre médecin, c’est pas la peine ! » Et on voit la catastrophe que ça a donné à Paris. L’État voudrait jouer le rôle du médecin, mais chacun son rôle ! 

Que nous apprend votre livre?
Moi, je ne fais pas un livre de prescription d’antibiotiques, j’essaye juste d’expliquer quelque chose dont les gens entendent parler et dont ils n’ont pas la moindre idée de ce que c’est. Je fais mon métier d’enseignant. Je ne donne pas des recettes de cuisine ou des recettes thérapeutiques. Ce n’est pas mon métier. Moi, mon métier, c’est de faire de la science et de diffuser la connaissance. Il y a dans mon livre beaucoup de choses que j’ai trouvées. Pendant 20 ans, j’ai fait partie des trois scientifiques les plus connus dans le domaine des antibiotiques. 

Comment voyez-vous l’avenir? Selon vous, sur quoi la médecine doit se consacrer en priorité dans les décennies à venir?
Le pire de tout, c’est la lutte contre la douleur. Il faut apprendre aux gens qu’il y a des douleurs qui sont tolérables et arrêter la surenchère avec les opioïdes et les antalgiques en général. Il y a des tas de méthodes qui permettent de supporter la douleur, comme la sophrologie ou le yoga. Ensuite, il faut arrêter les somnifères, parce que c’est la même drogue. On prescrit trop de benzodiazépines. Il faut arrêter les drogues qui sont neuro-manipulatrices, d’une part. D’autre part, il faut mener une lutte féroce contre le sucre pur et simple. Donc pour résumer : lutter contre l’obésité avec le sucre, lutter contre les drogues, y compris le tabac, les benzodiazépines et les opioïdes. Si on fait ça, on gagne déjà pas mal ! 

Une nouvelle pandémie est-elle à envisager? 
Les pandémies ont toujours existé. La vie est un combat, c’est comme ça. Il y a des centaines de coronavirus différents, des dizaines de virus de la grippe différents. Donc ma foi, une nouvelle pandémie à venir ? Pourquoi pas. 

Pour finir, la retraite, vous y pensez?
Oh, je ne sais pas pour l’instant, je ne me pose pas la question. La vie est imprévisible. Je travaille en tout cas… 

Interview réalisée par Marie Giancani